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Pionniers neptuniens

Balzac, Hugo, Flammarion, Doyle, pionniers du rêve neptunien

1/ Albert Béguin, critique littéraire et philosophe, soutient que Balzac est un visionnaire. Dans sa nouvelle Le Réquisitionnaire (1831), Balzac voit en effet la naissance de la parapsychologie qui se produirait dans la deuxième moitié du 20e siècle et qui tenterait de fonder comme science exacte l’étude des pouvoirs psychiques de l’homme : « À l’heure précise où Mme de Dey mourait à Carentan, son fils était fusillé dans le Morbihan. Nous pouvons joindre ce fait tragique à toutes les observations sur les sympathies qui méconnaissent les lois de l’espace ; documents que rassemblent avec une savante curiosité quelques hommes de solitude et qui serviront un jour à asseoir le bases d’une science nouvelle à laquelle il a manqué jusqu’à ce jour un homme de génie. » 

2/ Dans son étude sur Shakespeare, Hugo écrit : « Tout homme a en lui son Pathmos. Il est libre d’aller ou de ne point aller sur cet effrayant promontoire de la pensée d’où l’on aperçoit les ténèbres. S’il n’y va point, il est dans la vertu ordinaire, dans la foi ordinaire, dans le doute ordinaire, et c’est bien. Pour le repos intérieur, c’est évidemment le mieux. S’il va sur cette cime, il est pris. Les profondes vagues du prodige lui ont apparu. Nul ne voit impunément cet océan-là... Il s’obstine à cet abîme attirant, à ce sondage de l‘inexploré, à ce désintéressement de la terre et de la vie, à cette entée dans le défendu, à cet effort pour tâter l‘impalpable, à ce regard sur l’invisible, il y revient, ll y retourne, il s’y accoude, il s’y penche, il y fait un pas, puis deux, et c’est ainsi qu’on pénètre dans l’impénétrable, et c’est ainsi qu’on s’en va dans l’élargissement sans bornes de la condition infinie. » 

3/ En 1891, Camille Flammarion déclarait (Le Figaro illustré, novembre 1891) : « Notre fin de siècle ressemble un peu à celle du siècle précédent. L’esprit se sent fatigué des affirmations de la philosophie qui se qualifie de positive. On croit deviner qu’elle se trompe… » Chez Flammarion, à l‘observatoire de Juvisy, Conan Doyle venait de Londres, une fois par mois, étudier avec l‘astronome des phénomènes de voyance, d’apparitions, de matérialisations, d’ailleurs douteux. Flammarion croyait aux fantômes et Doyle collectionnait des « photographies de fées ». La science nouvelle pressentie par Balzac n’était pas née, mais sa nécessité apparaissait. 

Note à propos de l'astronome Camille Flammarion : il préfaça Les Mystères de l'Horoscope (1886) : comme tout astronome qui se respecte, il ne croyait pas à l'astrologie mais faisait preuve d'une incrédulité souriante bien différente de l'hostilité de ses confrères contemporains, absolument et définitivement acquis au positivisme. 

Sources : Le Matin des magiciens (Pauwels et Bergier, Gallimard,1960).

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